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Adolphine Chingan née Gothan dit Maman Simone – 1931- 

Adolphine Chingan était connue par tout le monde sous le nom de Maman Simone ou de Man Félo. Cette femme était altruiste, sensible, aimante, douce, serviable et courageuse. Son mari s’appelait Philippe Louis Chingan dit « Félo ». Il était appelé le « Père Chingan ». Ils ont eu treize enfants. L’éducation de leurs enfants occupaient une place primordiale aux yeux de ce couple ainsi que la pratique de leurs religions. 

Maman Simone était commerçante. Son travail occupait une place secondaire en raison de son nombre d’enfant. Elle parlait créole et français. Le créole n’était pas très conseillé dans le foyer. L’apprentissage de la langue française était très strict à cette époque. Or cet apprentissage était nécessaire pour la poursuite des études. Aux yeux de ce couple, il était préférable de l’inculquer à leurs enfants directement dans le foyer pour leurs permettre d’avoir de bon acquis. Maman Simone donnait une place principale à l’éducation de ses enfants et à son foyer. Elle se définissait comme une Guadeloupéenne d’origine indienne. 

Sa culture indienne occupait une place importante, elle était manifeste tant dans sa foi que dans son foyer. Maman Simone était hindouiste et catholique. Son mari et elle ont décidé préserver une chapelle indienne qui lui avait léguée par sa mère, située à Route de Caillebot dans la ville Le Moule. 

La chapelle a été d’abord l’œuvre de la mère de Maman Simone accompagnée de sa Grand-mère. La mère de Maman Simone était Mme Gothan Zacharie Appolinaire dit « man Fi ». Sa grand-mère était Coupou Ramsamy Maris dite “Bonne Anman”. Mme Gothan, accompagnée de sa mère “Bonne Anman” et de son frère “Ton Sonson”, a ramené trois pierres de la rivière de Capesterre-Belle-Eau, avant le cyclone de 1928. Les trois “divinités” ont été consacré en “Murti” grâce à un rituel effectué à l’époque dans la petite chapelle de Changy à Capesterre-Belle-Eau. Ils ont emmené ses pierres à l’îlet en direction de Coulé Baboulé en charrette, puis les ont placé sous l’arbre à Caillebot où se situe l’actuelle Chapelle de Maliémin (Marianman) et ses trois sœurs. En plaçant ces idoles ou « murti » (représentation de divinité), ils pouvaient pratiquer l’hindouisme non loin de chez eux, ils n’étaient plus obligés de se rendre à Capesterre-Belle-Eau.

Là où l’histoire de cette chapelle est très belle, c’est que la mère de l’époux de Maman Simone, Madame Siram Ramsamy Papaman Marie-Anne Germaine dit « Man tô » n’arrivait pas à avoir un enfant. Man tôt a été demandée la grâce à la « murti » de Maliémin (Marianman) pour avoir un enfant qui fut le Père Chingan dit « Félo ». 

Ainsi Maman Simone et Félo eurent tous les deux par leurs histoires familiales un attachement particulier à cette chapelle. Ils décidèrent ensemble de garder et protéger ce site. Cette chapelle était très réputée, elle a marqué en son temps une grande avancée pour les personnes venant de la ville du Moule. En effet ces derniers n’étaient plus obligés de se rendre dans la commune de Capesterre-Belle-Eau pour prier les divinités tamoules.

Ce couple a façonné le site en intégrant plusieurs chapelles dédiées à des divinités tamoules (Marianman ou Maliémin, Minadeyon et le Meenakshi Anman ou Minatchi Anman, Nagoulan). A la mort de son mari, Man Simone aidée et soutenue de ses enfants, a poursuivi cet ouvrage architectural. En 2007, le Shingam Kovil a été inauguré. Lors de cet évènement, l’inauguration, Man Simone et sa famille ont transporté cinq murti depuis son domicile en charrette jusqu’au Shingam Kovil. Elle avait à cœur de rendre plus accueillant son lieu de prière. A la fin de l’inauguration, elle a tenu à faire un Dalmon (partage) végétarien où tous les participants ou les spectateurs étaient reçus avec toute son hospitalité. Pour elle, ce lieu devait être celui d’un recueil pour tous et un cocon familial. 

Ce temple est un ensemble de chapelles donnant ainsi un espace à chaque divinité́. L’architecture typique des chapelles hindouistes créoles prend la forme d’un espace rectangulaire réservé à une ou deux divinité́s. La divinité est souvent représentée sous la forme d’une statue, posée sur un autel. Mais l’architecture du Shingam Kovil témoigne d’une nouveauté : une rencontre entre l’ancien et le contemporain, un espace teinté des couleurs des kovil indiens, empreinte de l’architecture moderne indienne. Une des chapelle du Shingam Kovil est surmontée par un immense dôme, dont l’édification est une véritable ingéniosité. A l’intérieur de cette bâtisse, de magnifiques sculptures représentent face à face des divinités. C’est un espace de dialogue entre les différentes sculptures des déités. 

Pour Maman Simone, la culture indienne occupait également une place prépondérante dans sa cuisine, elle usait d’une grande variété de plantes indiennes comestibles (Parka, Avelka, Mania, Ponlanka, Morrenga). Elle faisait souvent des colombos, des lotis, des lentilles talchis. Elle préparait des parka roussis, du dhal, des pichenga et des avelka. Ses origines indiennes étaient palpables également dans son langage, on l’entendait dire les mots « Apa » (mon père) ou « Anman » (ma mère). 

Lors de la cérémonie d’anniversaire du cent cinquantenaire de l’arrivée des Indiens en Guadeloupe, Maman Simone a été décoré le 1er octobre 2014 à la Résidence Départementale de bas du fort au Gosier. Le Conseil Général de la Guadeloupe avait tenu à l’honorer pour sa contribution au maintient de la culture de ses aînés tant sur le plan cultuel, que sur le plan culturel et pour son apport culinaire.

Cette femme a été une battante, véritable « militante » pour la culture indienne pour ses origines qu’elle avait à cœur de transmettre et de léguer à sa descendance. Les mots qui qualifieraient le mieux sa vie sont « Bravoure » et « Bonté ». Elle était un véritable guide pour ses petits-enfants et ses enfants. Pour un de ses petit-fils, elle était un « être éveillé ». Cette femme shakti avait pour priorité sa famille et l’éducation de ses enfants. Cette femme était d’une grande élégance, toujours bien apprêtée. Elle aimait réunir sa famille, elle incarnait les termes « amour, prière, tradition, conseil, complicité, médiatrice, pleine de vie ». Maman Simone était un pilier, un repère, un poto-mitan pour les siens. A la mort de son mari, cette femme shakti a géré d’une main de fer son foyer avec toute l’élégance et la bonté qui la représentaient. 

Portrait n°17 par Minakshi Carien 

D’après le témoignage de sa fille Carinne Golabkan, ses petit-fils Fabrice Golabkan et Joris Chingan

D’après un dossier de témoignages par son petit-fils Warren Chingan. 

Résidents tous les quatre dans la ville Le Moule en Guadeloupe. 

Portrait de Man Simone (Adolphine Chingan), photographie argentique, date et année inconnue, archive familiale, © Carinne Golabkan, Warren Chingan. 

Portrait de Man Simone (Adolphine Chingan) et son époux Félo (Philippe Chingan), photographie argentique, date et année inconnue, archive familiale, © Carinne Golabkan 
Portrait de Man Simone témoignant de sa joie de vivre, photographie argentique, date et année inconnue, archive familiale, ©Carinne Golabkan 

Portrait de Man Simone témoignant de sa foi, photographie argentique, date et année inconnue, archive familiale, © Carinne Golabkan 

Portrait de Man Simone le jour du mariage de sa fille, photographie argentique, date et année inconnue, archive familiale, © Carinne Golabkan 

Portrait de Man Simone accompagnée de sa fille Carinne Golabkan, photographie argentique, date et année inconnue, archive familiale, ©Carinne Golabkan 

Portrait de Man Simone accompagnée de ses enfants et petits-enfants au Shingam Kovil, photographie argentique, date et année inconnue, archive familiale, © Carinne Golabkan et Warren Chingan

Shingam Kovil (Temple Chingan), Route de Caillebot, 2023, photographies numériques,  ©Minakshi Carien  
Shingam Kovil (Temple Chingan), Route de Caillebot, 2023, photographies numériques, ©Minakshi Carien  
Portrait de Siram Ramsamy Papaman Marie-Anne Germaine dit « Man tô », photographie argentique, date et année inconnue, archive familiale, © Carinne Golabkan 
Extrait de date de naissance de Siram Ramsamy Papaman Marie-Anne Germaine dit « Man tô », reproduction numérique, archive familiale, © Carinne Golabkan 

Portrait de Zacharie Appolinaire dit « Man Fi », photographie d’identité, photographie argentique, date et année inconnue, archive familiale, © Carinne Golabkan 

Extrait de date de naissance de Zacharie Appolinaire dit « Man Fi », reproduction numérique,1902, Archive Nationale d’Outre-Mer © ANOM, Etat civil, Résultats, Guadeloupe, Le Moule, 1902.  

OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Minakshi Carien (31 janvier 2023). Adolphine Chingan née Gothan dit Maman Simone – 1931- . Projet çak. Consulté le 18 juin 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/t1ao


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